RIVAROL
- Les hommes ont quelquefois le droit de dire du mal des
femmes, jamais d'une femme.
- Toutes les femmes veulent qu'on les estime ; elles tiennent
beaucoup moins à ce qu'on les respecte.
- La paresse ne peut se passer de travail ; on ne se repose
voluptueusement que si l'on a pu se fatiguer.
- Quelles que soient les qualités d'un amant, rien ne le flatte
plus que d'être loué pour celles qu'il n'a pas.
- C'est après l'âge des passions que les grands hommes ont
produit leurs chefs-d'uvre, comme c'est après l'éruption
des volcans que la terre est plus fertile.
- Nos défauts devraient nous donner une qualité : l'indulgence
pour les défauts des autres.
- On n'est pas un homme d'esprit pour avoir beaucoup d'idées,
comme on n'est pas un bon général pour avoir beaucoup de
soldats.
- On ne va jamais aussi loin que lorsqu'on ne sait pas où l'on
va.
- On passe la moitié de sa vie à retenir sans comprendre et
l'autre moitié à comprendre sans retenir.
- La fausse modestie est le plus décent de tous les mensonges.
- Il est plus facile d'être bon pour tout le monde que pour
quelqu'un.
- C'est par l'esprit qu'on s'amuse ; c'est par le cur qu'on
ne s'ennuie pas.
- Le Devoir, c'est ce qu'on exige des autres.
- L'imagination est l'amie de l'avenir.
- La femme ne se donne qu'à son premier amour : à tous les
autres elle se reprend !
- Les femmes n'ont de bon que ce qu'elles ont de meilleur.
- Il y a des gens qui n'ont de leur fortune que la crainte de la
perdre.
- C'est sans doute un terrible avantage de n'avoir rien fait,
mais il ne faut pas en abuser.
- Le peuple donne sa faveur, jamais sa confiance.
- La société serait une chose charmante, si on s'intéressait
les uns aux autres.
- Sur vingt amis, dix-neuf disent de vous du mal, et le vingtième,
qui en dit du bien, le dit mal.
- Il n'est rien de si absent que la présence d'esprit.
- La peur est la plus terrible des passions parce qu'elle fait
ses premiers effets contre la raison ; elle paralyse le cur
et l'esprit.
- Le silence n'a jamais trahi personne.
- Le chat ne nous caresse pas, il se caresse à nous.
- Il est plus facile à l'imagination de se composer un enfer
avec la douleur qu'un paradis avec le plaisir.
- Je veux bien vieillir en vous aimant, mais non mourir sans vous
le dire.
- La liberté, pour l'homme, consiste à faire ce qu'il veut dans
ce qu'il peut, comme sa raison consiste à ne pas vouloir tout ce
qu'il peut.
- Les proverbes sont le fruit de l'expérience de tous les
peuples, et comme le bon sens de tous les siècles réduit en
formules.
- Rien n'étonne quand tout étonne : c'est l'état des enfants.
- La paresse n'est dans certains esprits que le dégoût de la
vie ; dans d'autres c'en est le mépris.
- L'espérance est le remède actuel des maux à venir.
- Il y a quelquefois de la résolution à ne rien résoudre.
- Les jeunes gens auprès des femmes sont des riches honteux, et
les vieillards des pauvres effrontés.
- L'esprit malin et le cur bon ; c'est la meilleure espèce
d'homme.
- Quand on a raison vingt-quatre heures avant le commun des
hommes, on passe pour n'avoir pas le sens commun pendant vingt-quatre
heures.
- L'estomac est le sol où germe la pensée.
- Sur dix personnes qui parlent de nous, neuf en disent du mal,
et souvent la seule personne qui en dit du bien le dit mal.
- Ce qui n'est pas clair n'est pas français.
- Ces mots ont dépassé ma pensée... Ils n'ont pas dû aller
bien loin.
- Toutes les vérités ne sont pas bonnes à dire ; tous les mensonges sont bons à entendre.
- Il faut s'être aimé bien peu pour rester amis quand on ne s'aime plus.
- Je n'ai pas une minute à moi... Je me surmène de paresse.
- L'homme a plus d'ardeur pour acquérir que pour conserver.
- L'amour naquit entre deux êtres qui se demandaient le même plaisir.
- Le désir est à la passion ce que le plaisir est au bonheur : mais le désir devient souvent passion, et nul plaisir n'est encore devenu bonheur.
- Le bonheur en général fait plus de flatteurs et d'envieux que le mérite ; parce qu'il éblouit et irrite plus de monde.
- Le dévot croit aux visions d'autrui ; le philosophe ne croit qu'aux siennes.
- Les gens du monde emploient mieux leurs loisirs que leur temps ; les pauvres n'ont pas de loisirs.
- Les sots devraient avoir pour les gens d'esprit une méfiance égale au mépris que ceux-ci ont pour eux.
- L'amour, qui vit dans les orages, et croît souvent au sein des perfidies, ne résiste pas toujours au calme de la fidélité.
- On a de la fortune sans bonheur, comme on a des femmes sans amour.
- Les idées sont des fonds qui ne portent intérêt qu'entre les mains du talent.
- L'homme, ici-bas, n'a pas reçu de provisions pour l'immortalité : c'est un voyageur qui finit sa route.
- Les moutons s'attroupent, et les lions s'isolent.
- L'homme modeste a tout à gagner, et l'orgueilleux a tout à perdre : car la modestie a toujours affaire à la générosité, et l'orgueil à l'envie.
- La nature a mis l'homme sur la terre avec des pouvoirs limités et des désirs sans bornes.
- La parole est la pensée extérieure, et la pensée est la parole intérieure.
- Il faut avoir l'appétit du pauvre pour jouir de la fortune du riche.
- En général, l'indulgence pour ceux qu'on connaît est bien plus rare que la pitié pour ceux qu'on ne connaît pas.
- La propreté embellit l'opulence et déguise la misère.
- La raison se compose de vérités qu'il faut dire et de vérités qu'il faut taire.
- Tout le monde s'agite pour trouver enfin le repos ; mais il y a des hommes si paresseux qu'ils mettent le but au début.
- Il y a des vertus qu'on ne peut exercer que quand on est riche.
- On corrompt la fille innocente avec des propos libres, et l'amour délicat séduit la femme galante : fruit nouveau pour l'une et l'autre.
- Il est des malheurs comme des vices dont on rougit d'autant moins qu'on les partage avec plus de monde.
- Quand on se propose un but, le temps, au lieu d'augmenter, diminue.
- Il faut faire, pour valoir quelque chose en ce monde, ce qu'on peut, ce qu'on doit et ce qui convient.
- Les visions ont un heureux instinct : elles ne viennent qu'à ceux qui doivent y croire.
- Le plus difficile en période troublée nest pas de faire son devoir, mais de le connaître.
- La jeunesse, comme la verdure, pare la terre ; mais l'éducation la couvre de moissons.
- Non je ne fais rien, il y a des années comme ça où l'on n'est pas en train.
- Celui qui n'a qu'un désir ou qu'une opinion est un homme à caractère.