Bertrand VERGELY

« Petite philosophie du bonheur »

- Beaucoup de gens ne sont pas philosophes, dit-on. Cela ne les empêche pas d'être heureux. Beaucoup de philosophes, à l'inverse, ont des problèmes. En quoi leur philosophie les aide-t-elle ?

- L'humanité serait certainement plus heureuse s'il y avait davantage de partage fraternel et démocratique et non des spécialistes prétendant énoncer les règles de ce que l'on doit vivre.

- La pensée n'est pas l'abstraction de la vie, mais la seconde vie de la vie.

- Non à la fausseté. Plutôt un réel sans rêves que des rêves en carton-pâte. Plutôt une âpreté vraie qu'une douceur mensongère.

- Tout s'apprend. Car la vie humaine a comme sens de passer d'une vie inconsciente à une vie consciente.

- Les vrais amis du genre humain ne sont pas des flatteurs ni des séducteurs, mais des amis exigeants.

- Le bonheur est l'oubli du malheur.

- C'est dans la paix, l'amour, la générosité et la fraternité que l'humanité devient géniale.

- Ce n'est pas aimer la vie que de ne pas désirer une vie heureuse.

- La morale est une chose. Faire la morale en est une autre.

- Il est facile de faire la morale. Il est plus difficile d'être moral.

- Faire son devoir a toujours procuré un plaisir. On appelle cela le contentement.

- Quand nous pouvons juger, nous possédons la joie de ne pas être prisonnier de celui que nous sommes.

- Il ne tient qu'à nous d'être heureux. Il suffit de le vouloir.

- Nous attendons toujours un miracle de l'extérieur. Or, le miracle est en nous, quand nous pensons, quand nous voulons.

- Insatisfaits, nous souffrons, satisfaits, nous nous ennuyons.

- Plus on a de plaisir, plus on a de désir. Tout gourmet en sait quelque chose.

- Les choses ont bien souvent de l'âme parce qu'elles ont un corps.

- La frustration a toujours été un moyen de contrainte et donc, un moyen de pouvoir.

- Un plaisir sans bonheur est un plaisir sans vie. Un bonheur dans le plaisir est une ouverture sur la vie.

- Le plaisir soulage. La joie comble.

- Étant bien, on est tellement bien que l'on n'a plus besoin d'avoir du plaisir afin d'avoir du plaisir.

- Quand on a l'âme joyeuse, cela se voit sur le visage.

- Un sourire ? C'est la poésie qui rentre dans le monde. Cela commence en desserrant les lèvres.

- La tristesse est un signe de pauvreté d'âme. On n'aime rien quand on est triste. Même pas soi-même. On trouve tout laid. On rend tout laid.

- Quand on ne voit plus que soi, on finit par ne plus voir qu'une vie allant irréductiblement vers la mort et donc vers l'échec.

- Aussi paradoxal que cela puisse paraître, ce n'est pas la mort qui rend la vie triste, mais l'irréalité, une vie sans vie étant pire qu'une vie mortelle.

- C'est un tempérament heureux qui rend la vie heureuse, et non tel ou tel élément harmonieux.

- La vie nous comble quand elle a un sens et qu'elle n'est pas simplement sensation.

- Il faut penser pour être heureux, car il faut avoir le bonheur exigeant et non relâché pour que celui-ci soit un véritable bonheur.

- On est souvent malheureux, faute de savoir vivre au présent. Sans cesse, on aspire à être ailleurs. Dans le passé ou dans l'avenir.

- Un plaisir réel, aussi petit soit-il, est bien préférable à un plaisir irréel, aussi grand soit-il.

- Le bonheur a quelque chose d'infini, à condition de ne pas oublier un point essentiel : la douceur.

- Vouloir être heureux revient à affirmer les valeurs les plus fondamentales de l'existence.

- Rien ne peut avoir prise sur celui qui avance inlassablement.

- Une belle femme est souvent courtisée pour sa beauté et non pour ce qu'elle est en profondeur.

- Une vie intense mais brève est à bien des égards plus enviable qu'une vie longue et ennuyeuse et, quitte à mourir, n'est-il pas préférable de mourir de rire que de mourir de tristesse ?

- Un être en pleine santé allège la société autour de lui.

- Il arrive souvent que l'on soit brouillé avec son corps, parce qu'en profondeur on est brouillé avec la vie.

- On a beau avoir besoin d'avoir pour être, on a aussi besoin d'être pour donner du sens au fait d'avoir.

- L'amour s'échange contre de l'amour et non contre de l'argent.

- Qu'est-ce que penser, sinon se demander pourquoi on fait ce que l'on fait ?

- Le sens de tout travail dans le monde matériel n'est-il pas de permettre à l'humanité de s'exprimer en tant que productrice de biens immatériels ?

- Ceux qui se font honorer se font aussi souvent dévorer.

- Il y a beaucoup de sagesse dans la méfiance à l'égard des honneurs. Un honneur que l'on reçoit n'est jamais neutre.

- On repousse avec rage ce que l'on souhaite secrètement posséder.

- Quand on s'est donné du mal pour une action et que personne ne le reconnaît, on a un légitime sentiment d'injustice.

- Celui qui ne s'incline devant rien est misérable d'orgueil, alors que celui qui accepte d'être reconnu est plus grand qu'on ne l'imagine.

- La guerre contre son propre orgueil est une grande guerre. Le silence sur ses actions intérieures, une grande parole.

- Jamais nous ne maîtrisons si peu notre vie que quand nous sommes distraits.

- L'esprit de jeu aiguise l'esprit de souplesse, d'intelligence et d'ingéniosité.

- La vie est une lutte, un effort, une tension. Le désir de « faire la fête » cherche à abolir cette lutte, cet effort, cette tension.

- Quand on est heureux, on ne pense à rien. Ou bien on n'est pas heureux et on ne le sera jamais.

- L'état heureux ne supporte pas le moindre recul ni le moindre partage avec quoi que ce soit. Pour tout donner, il exige que l'on donne tout, le bonheur résidant dans ce don.

- Si le bonheur est insouciant, tout ce qui est insouciant n'est pas forcément heureux.

- Il est providentiel que les hommes soient seuls, livrés à eux-mêmes. C'est ainsi qu'ils deviennent des adultes responsables, libres et créateurs.

- Il ne faut pas rêver. Il n'y a pas de miracle dans l'existence, pas de hasard, pas de bonne fortune et pas toujours quelqu'un décidé à rattraper à notre place les erreurs que nous avons faites.

- C'est parce que l'être humain est confronté à la mort, à la solitude et à l'angoisse, qu'il dévoile les ressources extraordinaires de son existence.

- Il faut venir au-devant de ce qui est essentiel pour que l'essentiel vienne à soi. Car la vie est un échange.

- Il y a en chacun un élan de vie qu'un rien suffit à susciter afin qu'il retrouve sa joie de vivre. Un sourire. Une main tendue. Un coin de ciel bleu derrière les nuages.

- Quand on est séduit, on s'aperçoit rarement qu'on l'est. Et pour cause. On est tellement séduit que celui ou celle qui nous séduit ne nous semble pas séduire.

- L'art de séduire est un art plein d'habileté, puisqu'il consiste à renvoyer à celui ou à celle que l'on veut séduire, l'image qu'il ou elle attend.

- Fatale pour ceux qui se laissent séduire, la séduction est avant tout fatale pour le séducteur ou la séductrice.

- Le plaisir plaît. Comme plaire donne du plaisir, tout ce qui plaît a tôt fait de nous mener à sa guise.

- Le désir de vie est quelque chose d'essentiel. Le plaisir qui va avec aussi. Sans eux, pas de vie. Pas d'être.

- Avoir du plaisir est agréable. Pouvoir avoir du plaisir avec quelqu'un, mais, en plus, pouvoir parler avec lui, devenir intelligent, découvrir son être en profondeur, c'est avoir plus que du plaisir.

- Le monde est malade à cause des passions qui envahissent la politique, la vie économique, les relations humaines.

- C'est en donnant plus que ce qu'il faut donner que l'on donne. Sagesse de cet excès.

- L'amour est plein d'illusions. Mais il n'est pas une illusion.

- Il est humain en effet d'être attiré par, et de vouloir attirer à soi ce qui nous attire.

- L'amour est fait de paroles, de dialogues infinis, d'échanges de pensées. Car l'amour veut aller au fondamental et y aller à deux.

- Quoi que l'on vive, il y a en cela, parce qu'on le vit, une victoire de l'être sur le néant et de la vie sur la mort.

- Le don appelle le don de notre part. Celui qui donne tout veut que l'on donne tout.

- On n'est pas un couple quand on est trop loin de l'autre. À force de ne pas se rencontrer, on finit par rompre tout lien.

- L'amour a deux faces : celle du plaisir qui attire à soi et celle du don qui va au-delà de soi. Si le fait de donner est souvent ramené à celui de prendre, le fait de prendre est parfois transcendé par le fait de donner.

- L'amitié est ce qui fait couler la vie. Elle rend celle-ci tellement douce qu'on en vient à pratiquer, grâce à elle, un divin oubli.

- Un individu qui n'a pas conscience de son origine est un individu errant, ne sachant plus qui il est, faute de savoir d'où il vient.

- La douceur de vivre aide à devenir doux ainsi qu'à hériter de la terre.

- La vie est douce quand elle est gonflée de vie, comme un fruit est gonflé de sève.

- La vie intérieure. La vie de l'esprit. Vie riche, transformant tout en occasion d'apprendre. Cela s'appelle penser.

- Les détails sont les sourires de la vie.

- Quand on est prêt pour une grande décision, on n'hésite pas. On s'engage à l'instant.

- La bêtise est apathie et l'apathie est bête.

- Mieux vaut un passionné qui réagit, qu'un calme qui ne réagit à rien.

- Les esprits superficiels ne pensent qu'à eux. Leur principe est qu'une bêtise qui plaît vaut mieux qu'une vérité qui dérange.

- La vie est une vie pour rien quand aucun regard divin ne se pose sur elle afin de l'élever à une dimension fondamentale.

- Le fond des choses est plus que vivant. Quand on le sait, on est plus qu'heureux.

- Philosopher sur le bonheur n'a jamais consisté à vivre n'importe quel bonheur, n'importe quand, avec n'importe qui, à n'importe quel prix.

- On dit que, par réaction, le sentiment de peine provoque la conscience du plaisir.